Il y a trois mille ans vivait un être humain comme vous et moi, habitant près d'une ville entourée de montagnes. Cet humain étudiait pour devenir homme-médecine et apprendre la connaissance de ses ancêtres, mais il n'était pas entièrement d'accord avec tout ce qu'il apprenait. Dans son cœur, il sentait qu'il devait exister quelque chose d'autre.
Un jour, alors qu'il dormait dans une grotte, il rêva qu'il voyait son propre corps endormi. Il sortit de la grotte par une nuit de nouvelle lune. Le ciel était clair et il pouvait voir des millions d'étoiles. Puis quelque chose se produisit en lui qui transforma sa vie à jamais. Il regarda ses mains, sentit son corps et entendit sa propre voix dire : « Je suis fait de lumière ; je suis constitué d'étoiles ».
Il regarda à nouveau les étoiles et comprit que ce ne sont pas les étoiles qui créent la lumière, mais plutôt la lumière qui crée les étoiles. « Tout est fait de lumière », se dit-il, « et l'espace entre toutes choses n'est pas vide. » Et il sut que tout ce qui existe n'est qu'un seul être vivant, et que la lumière est le messager de la vie, parce qu'elle est vivante et contient la totalité de l'information de vie.
Puis il réalisa que, bien qu'étant constitué d'étoiles, il n'était pas ces étoiles. « Je suis entre les étoiles », se dit-il. Alors, il appela les étoiles le tonal et la lumière entre les étoiles le nagual, et il sut que c'est la Vie (ou l'Intention) qui crée l'harmonie et l'espace entre les deux. Sans la Vie, le tonal et le nagual ne pourraient exister. La Vie est la force de l'absolu, du suprême, du Créateur qui crée toute chose.
Voici ce qu'il découvrit : tout ce qui existe est une manifestation de ce seul être vivant que l'on appelle Dieu. Tout est Dieu. Et il en conclut que la perception humaine n'est que de la lumière percevant de la lumière. Il vit aussi que la matière est un miroir – tout est un miroir réfléchissant la lumière et créant des images de cette lumière – et que le monde de l'illusion, le Rêve, n'est que de la fumée nous empêchant de voir qui nous sommes vraiment. « Le vrai moi est pur amour, pure lumière », dit-il.
Cette compréhension changea sa vie. Sachant qui il était vraiment, il regarda les autres êtres humains et le reste de la nature, et fut étonné de ce qu'il vit. Il se voyait lui-même en toute chose, dans chaque être humain, chaque animal, chaque arbre, dans l'eau, dans la pluie, les nuages et la terre. Et il voyait que la Vie unit le tonal et le nagual de différentes manières pour créer les milliards de manifestations de la Vie.
Durant ces quelques instants, il comprit tout. Il était enthousiasmé et son cœur rempli de paix. Il était impatient de partager avec les siens ce qu'il avait découvert. Mais aucun mot ne parvenait à l'expliquer. Il essaya d'en parler aux autres, mais ceux-ci ne comprenaient pas. Ils voyaient bien qu'il avait changé, que quelque chose de magnifique irradiait de ses yeux et de sa voix. Ils avaient aussi remarqué qu'il ne portait plus de jugement sur rien ni personne. Il n'était plus comme les autres.
Il comprenait très bien chacun, mais personne ne pouvait le comprendre, lui. Ils croyaient qu'il était une incarnation de Dieu. Il souriait lorsqu'il entendait cela et leur disait : « C'est vrai, je suis Dieu. Mais vous aussi, vous êtes Dieu. Vous et moi sommes pareils. Nous sommes des images de lumière. Nous sommes Dieu. » Mais les gens ne le comprenaient toujours pas.
Il avait découvert qu'il était un miroir pour les autres, dans lequel il pouvait se voir lui-même. « Chacun est un miroir », se dit-il. Il se voyait en chacun, mais personne ne le voyait, lui, comme soi-même. Et il réalisa que tous rêvaient, mais sans conscience, sans savoir vraiment qui ils étaient. Ils ne pouvaient le voir comme eux-mêmes, parce qu'il y avait un mur de brouillard ou de fumée entre les miroirs. Et ce mur de brouillard provenait de leur interprétation des images de lumière : le Rêve des humains.
Puis, il sut qu'il allait bientôt oublier ce qu'il avait appris. Il voulait se souvenir des visions qu'il avait eues, aussi décidé-t-il de s'appeler lui-même Miroir de Fumée, afin de toujours se rappeler que la matière est un miroir et que c'est la fumée entre les miroirs qui nous empêche de savoir qui nous sommes. Il dit : « Je suis Miroir de Fumée, parce que je me vois en chacun de vous, mais nous ne nous reconnaissons pas les uns les autres à cause de la fumée qu'il y a entre nous. Cette fumée est le Rêve, et le miroir c'est nous, le rêveur. »
Ce que vous voyez et entendez en ce moment précis n'est qu'un rêve. Vous rêvez à l'instant même, le cerveau éveillé.
Rêver est la fonction principale de notre esprit qui fait cela vingt-quatre heures par jour. Il rêve lorsque le cerveau est éveillé et également lorsque ce dernier dort. La différence c'est que, durant l'état de veille, le cadre de référence matériel nous fait percevoir les choses de façon linéaire. Lorsque nous nous endormons, nous n'avons plus ce cadre de référence, aussi le rêve a-t-il tendance à changer constamment.
Les humains rêvent en permanence. Avant notre naissance, les humains nous précédant ont créé un grand rêve extérieur que l'on appelle le rêve de la société ou le rêve de la planète. Le rêve de la planète et le rêve collectif résultant des milliards de rêves personnels plus petits qui, ensemble, forment le rêve d'une famille, le rêve d'une communauté, le rêve d'une ville, le rêve d'un pays, et finalement le rêve de toute l'humanité. Le rêve de la planète comprend toutes les règles de la société, ses croyances, ses lois, ses religions, ses différentes cultures et modes de vie, ses gouvernements, ses écoles, ses événements sociaux, et ses jours fériés.
Nous naissons avec la capacité d'apprendre comment rêver, et les humains qui nous précèdent nous apprennent à le faire de la façon dont le rêve la société. Le rêve de la planète a tellement de règles que lorsqu'un nouvel être humain naît, on capte son attention et on introduit ces règles sans son esprit. Le rêve de la planète se sert de papa et maman, des écoles et de la religion pour nous enseigner comment rêver.
L'attention est la capacité à être sélectif et à se concentrer exclusivement sur ce que l'on veut percevoir. Nous sommes capables de percevoir des millions de choses simultanément, mais en utilisant notre attention, nous pouvons maintenir ce que nous voulons au premier plan de notre conscience. Les adultes qui nous entouraient, lorsque nous étions enfant, ont donc capté notre attention et introduit des informations dans nos esprits par la répétition. C'est ainsi que nous avons appris tout ce que nous savons.
En nous servant de notre attention, nous avons assimilé toute une réalité, tout un rêve. Nous avons appris comment nous comporter en société : que croire et ne pas croire ; ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas ; ce qui est bon et ce qui est mauvais ; ce qui est beau et ce qui est laid ; ce qui est juste et ce qui est faux. Tout était déjà là : toute cette connaissance, toutes ces règles, tous ces concepts concernant la façon de se comporter dans le monde existaient avant notre naissance.
Lorsque vous alliez à l'école, vous étiez assis sur une petite chaise et votre attention se portait sur ce que le professeur vous enseignait. Lorsque vous alliez à l'église, votre attention se concentrait sur ce que le prêtre ou le pasteur vous disait. La même chose se produisait avec papa et maman, vos frères et vos sœurs. Tous s'efforçaient de capter votre attention.
Nous avons également appris à capter l'attention des autres, et développé un besoin d'attention qui est devenu très compétitif. Les enfants se disputent toujours l'attention de leurs parents, de leurs professeurs, de leurs amis : « Regardez-moi ! Regardez ce que je suis en train de faire ! Hé ho, je suis là. » Le besoin d'attention devient ainsi de plus en plus fort et se perpétue à l'âge adulte.
Le rêve de la planète capte notre attention et nous enseigne ce que l'on doit croire, à commencer par la langue que nous parlons. Le langage est le code de compréhension et de communication entre êtres humains. Chaque lettre, chaque mot de chaque langue représente un point sur lequel on s'est mis d'accord. On dit que ceci et une page dans un livre ; le mot page est un terme sur lequel on s'est mis d'accord. Une fois que l'on comprend le code, l'attention est captée et il y a transfert d'énergie d'une personne à l'autre.
Vous n'avez pas choisi de parler français. Vous n'avez pas choisi votre religion ni vos valeurs morales : elles étaient déjà là avant que vous ne soyez né. Nous n'avons jamais eu l'occasion de choisir ce que nous croyons ou non. Nous n'avons pas choisi la plus infime des choses à laquelle nous avons donné notre accord. Nous n'avons même pas choisi notre nom.
Enfants, nous n'avons pas eu la possibilité de choisir nos croyances, mais nous avons donné notre accord à l'information qui nous était transmise sur le rêve de la planète. La seule façon de conserver de l'information, c'est d'être d'accord avec elle. Le rêve de la planète peut capter notre attention, mais nous ne sommes pas d'accord, nous ne retenons pas cette information. Du moment que nous sommes d'accord, nous croyons : c'est ce que l'on appelle la foi. Avoir la foi signifie croire sans conditions.
Voilà comment on apprend quand on est enfant. Nous croyons tout ce que les adultes nous disent. Nous sommes d'accord avec eux, et notre foi est si forte que le système de croyance contrôle tout le rêve de notre vie. Nous n'avons pas choisi ces croyances, et nous pouvons même nous rebeller contre elles, mais nous ne sommes pas assez fort pour réussir cette rébellion. Il en résulte une soumission aux croyances, avec notre accord.
J'appelle cela le processus de domestication des humains. Grâce à cette domestication on apprend comment vivre et comment rêver. Au cours de notre domestication, l'information du rêve de la planète est transmise à notre rêve interne et construit tout notre système de croyances. Enfant, on nous apprend d'abord le nom des choses : maman, papa, lait, bouteille. Jour après jour, à la maison, à l'école, à l'église et par la télévision, on nous dit comment vivre, quels sont les comportements acceptables. Le rêve de la planète nous enseigne comment être des humains. Nous avons un concept de ce qu'est la « femme » et d'un de ce qu'est l'« homme ». Et nous apprenons aussi à juger : nous nous jugeons nous-mêmes, nous jugeons les autres, les voisins.
Les enfants sont domestiqués comme les chiens, les chats, ou tout autre animal. Pour instruire un chien, on le punit et n le récompense. De manière analogue, nous formons nos enfants, que nous aimons tant, exactement comme on dresserait un animal domestique : par un système de punitions et de récompenses.
Enfant, on nous disait : « Tu es un gentil garçon » ou « Tu es une gentille fille » lorsque nous faisions ce que papa et maman voulaient. Lorsque ce n'était pas le cas, on nous qualifiait de « méchant garçon » ou de « méchante fille ».
Chaque fois que nous enfreignions les règles nous étions punis ; lorsque nous les respections, on nous récompensait. On nous punissait plusieurs fois par jour, et nous recevions également plusieurs récompenses quotidiennes. Bientôt nous avons commencé à avoir peur d'être puni ou de ne pas recevoir de récompense, celle-ci consistant à obtenir l'attention de nos parents ou d'autres personnes telles que nos frères et sœurs, professeurs et amis. Nous avons donc eu besoin de capter l'attention des autres pour obtenir cette récompense. Comme elle nous faisait du bien, nous aussi avons continué de faire ce que les autres attendaient de nous pour l'obtenir. Ayant peur d'être puni et peur de ne pas être récompensé, nous nous sommes mis à prétendre être qui nous n'étions pas, juste pour faire plaisir aux autres, juste pour paraître assez bien à leurs yeux. Nous nous efforcions de faire plaisir à papa et maman, nous voulions plaire aux maîtres d'école, plaire à l'église, alors nous avons commencé à jouer des rôles. Nous prétendions être autre que nous n'étions, par peur d'être rejetés. Cette peur est ensuite devenue celle de ne pas être comme il faut, assez bon. Au bout du compte nous sommes devenus quelqu'un d'autre que nous-mêmes : des copies des croyances de maman, des croyances de papa, des croyances de la société et de la religion.
Toutes nos tendances naturelles se sont perdues au cours de ce processus de domestication. Et lorsque nous avons été assez âgés pour commencer à comprendre, nous avons appris le mot non. Les adultes disaient : « Ne fais pas ceci, ne fais pas cela. » Alors nous nous rebellions et disions : « non ! » pour défendre notre liberté. Nous voulions être nous-mêmes, mais nous étions trop petits, et les adultes étaient grands et forts. Au bout de quelques temps nous avons commencé à vivre dans la peur car nous savions que chaque fois que nous ferions quelque chose de faux, nous serions punis.
La domestication est si forte, qu'arrivés à un certain point de notre vie, nous n'avons plus besoin de personne pour nous domestiquer : ni papa et maman, ni l'école ou l'église. Nous sommes si bien dressés que nous devenons nos propres dresseurs. Nous sommes des animaux auto-domestiqués. Nous pouvons désormais nous domestiquer nous-mêmes selon le même système de croyance que l'on nous a inculqué, en utilisant le même processus de punition et de récompense. Nous nous punissons lorsque nous ne respectons pas les règles de notre système de croyances ; nous nous récompensons lorsque nous sommes un « gentil garçon » ou une « gentille fille ».
Ce système de croyances est comme un Livre de la Loi qui dirige notre esprit. Tout ce qui se trouve dans ce Livre de la Loi est notre vérité, sans l'ombre d'un doute. Tous nos jugements se fondent sur lui, même s'ils vont à l'encontre de notre propre nature intérieure. Même des lois morales telles que les Dix Commandements sont inscrites dans notre psychisme au cours du processus de domestication. Un par un, tous les accords que nous concluons s'ajoutent au Livre de la Loi puis dirigent notre vie.
Une part de notre esprit juge toute chose et chacun, y compris le temps, le chien, le chat : tout. Ce Juge intérieur utilise ce qu'il y a dans le Livre de la Loi pour juger tout ce que nous faisons et ne faisons pas, tout ce que nous ressentons et ne ressentons pas. Tout est soumis à la tyrannie de ce Juge. Chaque fois que nous faisons quelque chose de contraire au Livre de la Loi, le Juge nous déclare coupable, nous devons être punis et avoir honte. Cela se produit plusieurs fois par jour, jour après jour, durant toutes les années de notre vie.
Une autre part de nous-mêmes reçoit ces jugements : on l'appelle la Victime. La Victime subit la réprimande, la culpabilité et la honte. C'est cette partie de nous qui dit : « Pauvre de moi, je ne suis pas assez bon, je ne suis pas assez intelligent, je ne suis pas assez beau, je ne mérite pas d'amour, pauvre de moi. » Le Juge est d'accord et dit : « Oui, tu n'es pas assez bon. » Et tout cela découle d'un système de croyances auquel nous n'avons jamais choisi de croire. Ces croyances sont d'ailleurs si fortes que même des années plus tard, lorsqu'on découvre de nouveaux concepts et qu'on essaye de prendre ses propres décisions, on réalise qu'elles contrôlent toujours notre vie.
Tout ce qui va à l'encontre du Livre de la Loi vous fait ressentir une drôle de sensation dans le plexus solaire, que l'on appelle la peur. Contrevenir aux règles du Livre de la Loi rouvre vos plaies et votre réaction est de produire du poison émotionnel. Puisque tout ce qu'il y a dans le Livre de la Loi doit être vrai, tout ce qui remet en question vos croyances provoque un sentiment d'insécurité. Même si le Livre de la Loi est faux, il vous donne un sentiment de sécurité.
Voilà pourquoi il faut beaucoup de courage pour remettre en question ses propres croyances. Car même si on ne les pas choisies, il est néanmoins vrai qu'on leur a donné notre accord. Celui-ci est si fort que même en comprenant, dans le principe, que ces croyances ne sont pas vraies, à chaque enfreinte aux règles on subit quand même la critique, la culpabilité et la honte.
Tout comme le gouvernement possède un livre de lois qui contrôle le rêve de la société, notre système de croyances est le Livre de Lois qui dirige notre rêve personnel. Toutes ces lois existent dans notre tête, nous les croyons, et notre Juge intérieur fonde tout ce qu'il dit sur elles. Le Juge décrète et la Victime subit la culpabilité et la punition.
Mais qui dit que la justice est présente dans ce rêve ?
La vraie justice consiste à ne payer qu'une seule fois pour chaque erreur. La vraie injustice consiste à payer plus d'une fois pour chacune.
Combien de fois paie-t-on pour une seule erreur ?
Réponse : des milliers.
L'être humain est le seul animal sur terre qui paie des milliers de fois pour chacune de ses erreurs. Tous les autres animaux ne paient qu'une seule fois pour les erreurs qu'ils commettent. Mai pas nous. Nous avons une puissante mémoire. Nous commettons une erreur, nous nous jugeons, nous nous déclarons coupables et nous nous punissons. Si la justice existait, cela suffirait ; on n'aurait pas à reproduire ce processus. Mais chaque fois que nous y repensons, nous nous jugeons à nouveau, puis encore une fois, et ainsi de suite. Si on a un mari ou une femme, il ou elle nous rappelle aussi notre erreur, afin que l'on puisse de nouveau se juger, de nouveau se punir et de nouveau se déclarer coupable. Est-ce juste ?
Combien de fois fait-on payer la même erreur à son conjoint, à ses enfants ou à ses parents ? Chaque fois qu'on s'en souvient, on les juge à nouveau, on leur transmet tout le poison émotionnel que nous fait ressentir cette injustice, puis on les fait à nouveau payer pour leur erreur.
Est-ce là de la justice ?
Le Juge a tort parce que le système de croyances, le Livre de la Loi, est faux. Le rêve tout entier se fonde sur une loi fausse. Quatre-vingt-quinze pour cent des croyances que nous avons gravées dans notre mémoire ne sont que des mensonges, et nous souffrons de croire ces mensonges.
Dans le rêve de la planète, il semble normal que les humains souffrent, qu'ils vivent dans la peur et provoquent des drames émotionnels. Ce rêve n'est pas agréable ; c'est un rêve de violence, de peur, de guerre, un rêve d'injustice. Quand aux rêves personnels des humains, même s'ils présentent quelques variations, de manière générale ce sont des cauchemars.
Si l'on regarde la société humaine, on constate que la raison pour laquelle il est si difficile d'y vivre est qu'elle est régie par la peur. Aux quatre coins de la planète on voit de la souffrance humaine, de la colère, un esprit de revanche, des toxicomanies, de la violence dans la rue, et une incroyable injustice. Présente à des niveaux différents dans chaque pays, la peur contrôle tout le rêve de la planète.
Si l'on compare le rêve de la société humaine avec la description de l'enfer que les religions du monde entier ont promulguée, on constate que les deux sont identiques. Les religions disent que l'enfer est un lieu de punition, de peur, de douleur et de souffrance, un lieu où le feu vous brûle. Le feu résulte des émotions nées de la peur. Chaque fois que l'on ressent de la colère, de la jalousie, de l'envie, ou de la haine, on sent un feu qui brûle en soi. On vit dans un rêve d'enfer.
Si vous considérez l'enfer comme un état d'esprit, alors il est présent partout autour de nous. Certains disent que si nous ne faisons pas ce qu'ils nous commandent, nous irons en enfer. Pas de chance : nous y sommes déjà, et ces personnes aussi ! Aucun être humain ne peut condamner un autre à l'enfer, parce que nous y sommes tous déjà. Les autres peuvent nous plonger dans un enfer plus profond, c'est vrai. Mais seulement si nous y consentons.
Chaque être humain a son propre rêve personnel et, comme celui de la société, il est généralement régi par la peur. On apprend à rêver l'enfer dans sa propre existence, dans on rêve personnel. Les mêmes peurs se manifestent de façon différente chez chacun, bien entendu, mais nous ressentons tous de la colère, de la jalousie, de la haine, de l'envie, et d'autres émotions négatives. Notre rêve personnel peut aussi devenir un cauchemar perpétuel dans lequel nous souffrons et vivons dans un état de peur permanent. Mais il n'est pas indispensable de faire des cauchemars. Il est possible d'avoir de beaux rêves.
Toute l'humanité est à la recherche de la vérité, de la justice et de la beauté. Nous sommes constamment en quête de vérité parce que nous ne croyons qu'aux mensonges gravés dans notre esprit. Nous recherchons la justice parce qu'il n'y en a pas dans notre système de croyance. Nous recherchons la beauté parce que, peu importe le degré de beauté d'une personne, nous ne croyons pas qu'elle soit belle. Nous ne cessons de chercher et chercher, alors que tout est déjà en nous. Il n'y a aucune vérité à trouver. Où que nous nous regardions, tout ce que nous voyons est la vérité, mais les accords que nous en avons conclus et les croyances que nous entretenons nous privent d'yeux pour la voir.
Nous ne croyons pas la vérité parce que nous sommes aveugles, en raison des fausses croyances encombrant notre esprit. Nous avons besoin d'avoir raison et de donner tort aux autres. Nous avons confiance en nos croyances et celles-ci nous condamnent à souffrir. C'est comme si vous viviez au bau milieu d'un brouillard qui n'est même pas réel, qui n'est qu'un rêve, votre rêve de vie personnel, ce que vous croyez, tous les concepts concernant qui vous êtes, tous les accords que vous avez passés avec autrui, avec vous-même et même avec Dieu.
Votre esprit tout entier est un brouillard que les Toltèques appellent un mitote (prononcez mi-to-té). Votre esprit est un rêve dans lequel des milliers de personnes parlent en même temps, et personne ne comprend personne. Telle est la condition de l'esprit humain : un grand mitote, à cause duquel il vous est impossible de voir qui vous êtes vraiment. En Inde, on appelle le mitote « maya », ce qui signifie « illusion ». C'est l'idée que se fait la personnalité du « Je suis ». tout ce que vous croyez à propos de vous-même et du monde, tous les concepts et les programmes que vous avez en tête, tout cela est le mitote. Nous ne pouvons voir qui nous sommes vraiment, ni même que nous ne sommes pas libres.
C'est pour cela que les humains résistent à la vie. Être vivant est leur plus grande peur. Ce n'est pas la mort, mais le risque d'être vivant et d'exprimer qui l'on et vraiment qui suscite la peur la plus importante. Être simplement soi-même, voilà ce que l'on redoute le plus. Nous avons appris à vivre en nous efforçant de satisfaire les besoins d'autrui, à vivre en fonction du point de vue des autres, de peur de ne pas être accepté et de ne pas être assez bien à leurs yeux.
Au cours du processus de domestication, on élabore une image de ce qu'est la perfection afin d'essayer d'être toujours comme il faut. On crée une image de comment l'on devrait être pour être accepté par tout le monde. En particulier, on s'efforce de plaire à ceux qui nous aiment, comme papa et maman, nos grands frères et sœurs, le prêtre et nos professeurs. En essayant d'être comme il faut à leurs yeux, on construit cette image de perfection à laquelle il est impossible de se conformer. Nous avons créé cette image, mais elle n'est pas réelle. Nous ne serons donc jamais parfaits, de ce point de vue là. Jamais !
N'étant pas parfait, nous nous rejetons. Le degré de rejet de soi dépend de l'efficacité avec laquelle les adultes ont réussi à détruire notre intégrité. En effet, une fois le processus de domestication achevé, il ne s'agit plus d'être comme il faut aux yeux des autres ; désormais, nous ne sommes pas comme il faut pour nous-mêmes, faute de correspondre à notre propre idée de la perfection. Nous sommes incapables de nous pardonner de ne pas être tel que nous le souhaitons, ou plutôt tel que nous croyons devoir être. Nous ne nous pardonnons pas de n'être pas parfaits.
Nous savons que nous ne sommes pas comme nous croyons devoir être, aussi nous sentons-nous faux, frustrés, malhonnêtes. Nous essayons de nous dissimuler, en prétendant être qui nous ne sommes pas. Résultat : nous manquons d'authenticité et nous portons des masques sociaux pour éviter que les autres le remarquent. Nous avons une telle peur qu'on découvre que nous ne sommes pas qui nous prétendons être. Naturellement, nous jugeons aussi les autres d'après notre idée de la perfection, et bien entendu ceux-ci déçoivent toujours nos attentes.
Nous allons jusqu'à nous déshonorer, simplement pour plaire à autrui. Parfois certains abîment même leur corps pour être acceptés par les autres. On voit des adolescents prendre de la drogue pour ne pas être rejetés par leurs copains. Ils ne sont pas conscients que leur vrai problème est de ne pas s'accepter. Ils se rejettent eux-mêmes faute d'être ce qu'ils prétendent être. Ils souhaiteraient être comme ceci ou comme cela mais, puisque ce n'est pas le cas, ils se culpabilisent et ont honte.
Les humains se punissent indéfiniment, à défaut d'être ce qu'ils croient devoir être. Ils se maltraitent constamment, et se servent aussi des autres pour se faire du mal. Mais personne ne nous maltraite plus que nous-mêmes, car ce sont le Juge, la Victime et le système de croyances qui nous poussent à agir ainsi. Bien sûr, des gens diront que leur mari ou leur femme, leur père ou leur mère, leur ont infligé des mauvais traitements, mais vous savez comme moi que nous nous auto-maltraitons encore plus. La manière dont on se juge est la plus sévère qui soit. Lorsqu'on commet une erreur en présence d'autrui, on essaye de la cacher ou de la nier. Mais dès qu'on se retrouve seul, le Juge devient si puissant, la culpabilité si forte, que l'on se sent stupide, mauvais ou dénué de valeur.
Au cours de toute votre existence, personne ne vous a jamais davantage maltraité que vous-même. Et les limites que vous mettez à vos propres mauvais traitements envers vous-même sont exactement celles que vous tolérerez de la part d'autrui. Si quelqu'un vous maltraite un peu plus que vous-même, sans doute le fuirez-vous. Mais s'il le fait un peu moins que vous-même, vous continuerez probablement cette relation et tolérerez cette situation indéfiniment.
Si vous vous maltraitez terriblement, vous pouvez même supporter quelqu'un qui vous bat, qui vous humilie et vous traite comme moins que rien. Pourquoi ? Parce que, dans votre système de croyance, vous vous dites : « Je le mérite. Cette personne me fait une faveur d'être avec moi. Je ne suis pas digne d'amour et de respect. Je ne suis pas assez bon(ne). »
On a besoin d'être accepté et aimé par autrui, mais on est incapable de s'accepter et de s'aimer soi-même. Plus on a d'amour-propre, moins on se maltraite. Se maltraiter provient d'un rejet de soi, celui-ci résultant d'une image de la perfection à laquelle il est impossible de se conformer. L'idée qu'on se fait de la perfection est la raison du rejet de soi-même ; c'est à cause d'elle qu'on ne s'accepte pas tel qu'on est, ni les autres tels qu'ils sont.
vous avez conclu des milliers d'accords avec vous-mêmes, avec les autres, avec le rêve de votre vie, avec Dieu, avec la société, avec vos parents, votre conjoint, vos enfants. Mais les plus importants sont ceux que vous avez passés avec vous-mêmes. Au moyen de ces accords, vous vous dites qui vous êtes, ce que vous sentez, ce que vous croyez, et comment vous comporter. Le résultat est ce que vous appelez votre personnalité. Dans ces accords, vous dites : « Voilà ce que je suis. Voilà ce que je crois. Il y a des choses que je peux faire, d'autres non. Ceci est la réalité, cela est imaginaire ; ceci est possible, cela impossible. »
Un seul de ces accords ne pose guère de problèmes, mais nombreux sont ceux qui vous font souffrir et échouer dans la vie. Si vous voulez connaître une existence faite de joie et de plénitude, il vous faut trouver le courage de rompre ceux de vos accords qui sont fondés sur la peur, et revendiquer votre pouvoir personnel. Les accords dérivés de la peur nous font dépenser énormément d'énergie, tandis que ceux découlant de l'amour nous aident à conserver cette énergie et même à en voir davantage.
Chacun d'entre nous est né avec une certaine quantité de pouvoir personnel que nous reconstruisons chaque jour en nous reposant. Malheureusement, nous épuisons tout ce pouvoir personnel à conclure nos accords puis à les tenir, de sorte que nous nous sentons impuissants. Nous avons tout juste assez d'énergie pour survivre chaque jour, car presque tout notre pouvoir sert à respecter les accords qui nous maintiennent dans le rêve de la planète. Comment pouvons-nous changer le rêve de notre vie alors que nous n'avons pas la pouvoir de modifier le plus infime de nos accords ?
Si nous sommes capables de voir que nos accords dirigent notre existence, et si nous n'aimons pas le rêve de notre vie, alors il nous faut changer ces accords. Quand nous serons enfin prêts à le faire, il existe quatre accords toltèques très puissants qui nous aideront à rompre les autres accords issus de la peur qui nous vident de notre énergie.
Chaque fois que vous rompez un accord, tout le pouvoir que vous avez mis à le créer vous revient. Si vous adoptez ces quatre accords toltèques, ils produiront suffisamment de pouvoir personnel pour que vous puissiez changer toute la structure de vos anciens accords.
Il vous faut une volonté très forte pour adopter ces quatre accords toltèques, mais si vous parvenez à commencer à vivre avec eux, les transformations qui s'opéreront dans votre vie seront étonnantes. Vous verrez le drame de l'enfer disparaître sous vos yeux. Au lieu de vivre dans le cauchemar de l'enfer, vous créerez un nouveau rêve : votre rêve de paradis personnel.
Les quatre accords toltèques, la voie de la liberté personnelle - Don Miguel Ruiz, pages 15 à 35
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Commentaires 1
Bonjour,
C'est sympa de vouloir partager le travail de don Miguel… mais il est légalement interdit de citer plus d'un paragraphe d'un livre, que ce soit sur Iternet ou dans un autre livre.
Vous risquez des ennuis avec l'éditeur détenteur des droits, qui est lui-même redevable à l'éditeur américain.
Merci de renvoyer les personnes qui visitent votre site sur les livres papiers, les e-books et livres audio de don Miguel.
cordialement,
Olivier Clerc