7 minutes de lecture (1448 mots)

Introduction à la symbolique précolombienne

dfgdfg---Copier-2

La société – contemporaine – à laquelle nous appartenons, a conçu l'idée que Dieu – l'unité originelle – est une invention de l'homme, quoique certains de ses membres pensent plutôt que la déité est une découverte humaine qui s'est produite à une certaine étape de l'histoire. Dans les deux cas c'est l'homme qui crée Dieu, en contradiction absolue avec ce que soutiennent à l'unanimité toutes les traditions et civilisations dont on ait mémoire, lesquelles affirment et établissent la juste relation hiérarchique entre le créateur et sa créature.

Cette interversion flagrante trouve logiquement sa source dans la méconnaissance du sacré que nous avons actuellement, ce pour quoi nous sommes inconsciemment obligés "d'humaniser" le concept de Dieu, le rendre anthropomorphe – ce qui revient à rabaisser la déité au niveau de la pensée et de la conception humaines – et la réduire à l'échelle de l'homme d'aujourd'hui et à l'étroitesse de sa vision. Alors ce dernier ne trouve rien de mieux que de faire mourir les dieux, ne plus "croire" en eux mais plutôt en "l'humain" – ce qui est hélas pris comme un progrès – comme s'il était possible que les énergies cosmiques et harmoniques, dont les principes sont l'expression des déités, cessent d'être ou d'exister par le simple biais de leur négation.

Nous sommes accoutumés à songer aux panthéons grec, romain, égyptien, chaldéen ou maya – ou encore à ceux de juifs, chrétiens, islamiques, hindouistes et bouddhistes –, comme si leurs dieux étaient propriété privée de ces peuples et religions et que, de surcroît, ils soient entièrement distincts les uns des autres, d'identités parfaitement différenciées dans un imaginaire système de classification. La réalité du sacré est ainsi réduite à la capacité "spéculative" de l'homme – ou à l'étiquette sur un casier – et cependant l'on n'observe pas que ces mêmes hommes reconnurent la déité au travers des "nombres" ou mesures harmoniques, patrons ou moules de pensée universelle et expression des archétypes toujours présents – comme parties constituantes du cosmos comme le reflètent leurs calendriers – que les symboles représentent et dont la force-énergie n'a cessé ni ne cessera de se manifester tant qu'existeront le temps et l'espace. C'est ce qui a lieu dans les astres et les étoiles – en particulier le Soleil, la Lune, Vénus et les Pléiades –, sur un certain plan symboles des dieux, planètes et constellations qui ont d'ailleurs survécu aux grecs, romains, égyptiens, chaldéens et mayas et que l'on peut encore observer à l'œil nu par les nuits dégagées. Ces astres et ces étoiles témoignent des énergies cosmiques qui sont l'expression des principes divins, et il est indispensable de rappeler que ce sont les mêmes astres et étoiles que contemplèrent dans la voûte céleste – il y a à peine cinq siècles, avant la "découverte" de l'Amérique – les peuples précolombiens, qui les assimilèrent dans leur cosmogonie à certaines idées-forces, dont ils expriment la manifestation – visible en toutes choses – dans l'immensité du ciel, duquel dépendent la terre et l'homme. D'autres personnes habitent sous le firmament, sur la terre que labourèrent les antiques civilisations américaines ; mais les nombres et les astres – incarnations des principes éternels – sont toujours les mêmes et demeurent aussi vivants que les déités, lesquelles continuent d'ailleurs de s'exprimer comme des phénomènes naturels et atmosphériques, et des énergies animistes et spirituelles toujours présentes dans la création. Car il est connu que les dieux ne meurent pas et c'est là précisément ce qui les a faits immortels de tout temps et en tout lieu. Plus exactement, ils le sont parce qu'ils sont morts à la mort et ne peuvent plus mourir. Le dieu sacrifié ressuscite, se régénère et transforme ses énergies en les cristallisant dans le ciel – sa véritable demeure et sa provenance – sous forme de planète, symbole du principe dont ce dieu témoigne de manière active et manifeste. Et même, les dieux sont antérieurs à cette création et c'est de fait leur sacrifice qui la produit "alors qu'il faisait encore nuit", selon nous le dit le mythe teotihuacain. 

Fondation de Tenochtitlán, Codex Mendoza

Les cosmogonies précolombiennes constituent une modalité de la Cosmogonie archétypale – dans laquelle l'homme est inclus – au-delà de toute spéculation personnelle et malgré ses différents modes d'expression en accord avec les caractéristiques d'espace, de temps ou de procédés, qui tout à la fois voilent et dévoilent son contenu originel, son essence. Pour cette raison ces cosmogonies demeurent vivantes aujourd'hui, dans leurs symboles et dans leurs mythes, qui attendent d'être revivifiés par la connaissance, par leur invocation, pour que se révèle dans toute sa magnitude leur énergie potentielle. Les anciens hommes ont disparu, mais non leurs dieux éternels – Quetzalcóatl, Kukulkán, Viracocha – qui cohabitent toujours avec nous et forment une grande partie de l'histoire de nos pays américains et, encore que nous n'en soyons pas conscients, de notre propre histoire. Il est vrai que – en Amérique du Nord, Centrale et du Sud – plusieurs millions de personnes les invoquent grâce aux rites anciens traditionnels, ainsi que sous diverses formes religieuses ou teintées de folklore. La déité quant à elle, est la même pour tous les peuples qui la connaissent, qu'ils la nomment d'une façon ou d'une autre et quelle que soit la forme particulière qu'elle prenne ; cette assertion vaut pour toutes les traditions, vivantes ou mortes, puisque finalement la déité est unique, encore que ses manifestations soient multiples. Lorsque les sages nahuas, les tlamatinimes furent interrogés par les douze premiers religieux catholiques arrivés au Mexique au sujet de leurs croyances et qu'ils apprirent de la bouche des inquisiteurs que leurs dieux n'existaient plus, ils demandèrent à mourir avec eux. Ils acceptèrent plus tard de parler calmement:  

    "Nous romprons un peu, maintenant nous ouvrirons un petit peu le secret, l'arche de Notre Seigneur". "Vous nous dîtes que nos dieux n'étaient pas véritables. Cette parole est nouvelle, celle que vous parlez, et par elle nous sommes perturbés, et par elle nous sommes troublés. Car nos géniteurs, ceux qui ont été, n'avaient pas coutume de parler ainsi".

Ensuite ils décrivirent et énumérèrent, de manière simple afin d'être compris, une série d'images de la divinité, la tradition et le rite qui, soit dit en passant, correspondent à leurs analogues chrétiens. Puis, récapitulant: "Nous, nous savons à qui l'on doit la vie, à qui l'on doit de naître, à qui l'on doit d'être engendré, à qui l'on doit de grandir, comment il faut invoquer, comment il faut prier". Au travers de leurs propres paroles l'on peut réellement observer que les tlanatinimes n'arrivaient pas à comprendre cette situation qui les dépassait. Comment les hommes pouvaient-ils supprimer les dieux par décret ? Et comment l'unique réalité, la vérité, pouvait-elle être annihilée par l'ombre et l'illusion ? Écoutons-les :  

      "Vraiment nous ne croyons pas encore, nous ne le tenons pas pour vrai, encore que cela nous offense".2

Offensés ou non, les conquistadors abolirent leur image du monde, de l'espace et du temps, leur conception de la vie et de l'homme, leurs mythes et leurs rites, et détruisirent la presque totalité de leur culture. Et, puisque malheureusement ces cultures sont mortes en apparence, nous devons pour les comprendre suivre un difficile processus de reconstruction au travers de leurs vestiges, règles et monuments incomplets, de chroniques des conquistadors et de divers témoignages, ainsi que quelques lambeaux encore vivants du folklore, la danse, les motifs de tissage et de vannerie, etc. Mais aussi et surtout nous mettrons l'accent sur leurs symboles et mythes cosmogoniques et théogoniques clairs et précis, qui aient leurs correspondances chez d'autres peuples, y compris leurs modèles de l'univers et leurs structures culturelles – mises en évidence par exemple dans la symbolique de leurs constructions à la base géométrique et numérale –, qui nous permettront par analogie d'appréhender les traditions américaines et d'en obtenir une idée suffisamment claire, au moins comme point de départ pour tenter de les comprendre dans leur essence, sans que leur signification ne soit synonyme que de tristes ruines et vieilleries dénuées de sens, ou d'un passé inconnu, hypothétique et grandiose duquel l'on ignore tout. Par ailleurs et comme nous l'avons mentionné, malgré la mise à sac, l'annihilation systématique et les multiples vexations subies, les traditions précolombiennes sont encore vivantes et en vigueur, révélées par leurs symboles, dans leurs mythes et leur cosmogonie, dans leurs pensées archétypales, leurs modules harmoniques et leurs dieux qui n'attendent que d'être revivifiés pour actualiser leur puissance ; c'est-à-dire être appréhendés, compris avec le cœur, pour agir en nous. 

NOTES
1 Desquels il est dit qu'ils doivent revenir.
2 El libro de losDoce, chapitre VII du texte náhuatl publié par W. Lehmann. Traduction de Miguel León Portilla.

LIVRE : LE SYMBOLISME PRÉCOLOMBIEN. CHAPITRE I
Cosmovision des Cultures Archaïques
Federico González.

source  http://symbolos-fg.com/sprec01.htm

×
Stay Informed

When you subscribe to the blog, we will send you an e-mail when there are new updates on the site so you wouldn't miss them.

Des symboles et de la symbolique
Fêtes des fous, des sots, des innocents, de l’âne,...
 

Commentaires

Donnez votre avis
déjà membre vous connecter
Invité
mercredi 11 décembre 2024

Image Captcha

Inscrivez-vous pour être toujours informés de nos publications

Connexion

26 mars 2020
Art et Culture
Big Funk Brass apporte, en ces temps difficiles d'épidémie, son énergie et son inspiration débridée avec la sortie de l'album Higher le 30/04/2020, marqué par les participations annoncées de Ben l'Onc...
22 janvier 2020
Expression Libre
"L'amour inconditionnel ne veut pas dire accepter tout sans condition. Il trouve son équilibre dans le respect de soi." Christine Taddei, coach de vie   L'Amour Inconditionnel pour moi déjà c'est de r...

Commentaires Articles

Invité - Camille RIOPY soigne avec les notes de piano de BLISS
4 juin 2024
Bonjour, J'aimerais rentrer en contact avec vous pour vous partager nos dernièr...
Invité - Jacques Saint André Liste de sites Web
10 mai 2022
Bonjour le "hasard" faisant bien les choses je viens de découvrir avec étonnemen...
Invité - alexandre Les Grandes Initiées
16 janvier 2022
La femme Ysha a été initié par le Serpent à l'arbre des séphiroth ou à la Kundal...
Invité - Pol Meurs et deviens
14 décembre 2021
MERCI pour cette très BELLE MISSIVE INSPIRÉE et INSPIRATRICE .... Toute MORT n'e...
Sève Quelques codes De Grigori Petrovitch Grabovoï
30 août 2021
vous pouvez aussi créer vos propre séquences de nombre a vous en suivant vos int...

Please publish modules in offcanvas position.

Paramétrages de cookies

×

Cookies fonctionnels

Ce site utilise des cookies pour assurer son bon fonctionnement et ne peuvent pas être désactivés de nos systèmes. Nous ne les utilisons pas à des fins publicitaires. Si ces cookies sont bloqués, certaines parties du site ne pourront pas fonctionner.

Mesure d'audience

Ce site utilise des cookies de mesure et d’analyse d’audience, tels que Google Analytics et Google Ads, afin d’évaluer et d’améliorer notre site internet.

Contenus interactifs

Ce site utilise des composants tiers, tels que NotAllowedScript67595ea011a5bReCAPTCHA, Google NotAllowedScript67595ea011808Maps, MailChimp ou Calameo, qui peuvent déposer des cookies sur votre machine. Si vous décider de bloquer un composant, le contenu ne s’affichera pas

Réseaux sociaux/Vidéos

Des plug-ins de réseaux sociaux et de vidéos, qui exploitent des cookies, sont présents sur ce site web. Ils permettent d’améliorer la convivialité et la promotion du site grâce à différentes interactions sociales.

Session

Veuillez vous connecter pour voir vos activités!

Autres cookies

Ce site web utilise un certain nombre de cookies pour gérer, par exemple, les sessions utilisateurs.